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MOÏSE CORDOVERO. Rabbin
et cabaliste qui vécut à Safed, en Haute Gallilée (1522-1570). Auteur
d'une oeuvre considérable qui compte plus de quize mille pages
d'écritures serrées, c'est l'un des plus grands théoriciens
systématique de la cabale espagnole après l'Expulsion (1492). Outre une
très solide formation dans les sciences classiques du judaïsme (Bible
et Talmud), marquée par son accession très précoce au rang de
décisionnaire de la Loi, il commença à étudier la philosophie de
Maïmonide mais s'en détourna, vers l'âge de vingt ans, pour se
consacrer totalement à l'apprentissage puis à l'enseignement de la
cabale qu'il découvrit grâce à l'enseignement de son maître et futur
beau-frère, R. Salomon Halévy Alkabetz. Il fonda une école et eut de
nombreux disciples, parmi lesquels Isaac Louria et Hayim Vital,
Mordekhaï Dato, Elie Da Vidas. Le chef du judaïsme italien de l'époque,
Menahem Azaria de Fano, peut être considéré également comme l'un de ses
disciples, au moins à travers ses écrits. Sa contribution au renouveau
de la théosophie juive et à l'approfondissement spéculatif de ses
doctrines fut de première grandeur et eut un impact considérable. Il
mit en valeur la nature paradoxale de toute manifestation du divin à
l'extérieur de lui-même, qui équivaut toujours à une forme
d'occultation. Son oeuvre la plus célèbre, le Pardés Rimonim (Le verger
des grenadiers) est à la fois une présentation didactique de la cabale
et un essai pour résoudre les contraditions apparues au cours de son
histoire entre les différentes écoles qui s'en réclamaient. Il rédigea
un commentaire du Zohar intitulé Or Yaqar (La lumière précieuse) qui
est un monument gigantesque construit autour de la Bible des cabalistes
(une trentaine de volumes, en cours de publication). Son oeuvre de
maturité, le Elimah Rabbati, n'a été publiée que partiellement, mais de
récentes découvertes de manuscrits de plusieurs parties inédites
devraient permettre d'en connaître un plus vaste ensemble. Il expose la
signification éthique de la doctrine des sefirot (émanations) dans un
petit traité, le Palmier de Débora, qui faisait originellement partie
du Elimah mais en fut séparée par la suite. La pensée de Cordovéro se
distingue par la recherche explicite de l'intelligibilité des sources
littéraires et des motifs de la cabale. Il tente d'appliquer la méthode
discursive utilisée dans l'étude du Talmud pour scruter les propos de
ses prédécesseurs et lever les contradictions entre leurs affirmations.
Tout en étant l'un des représentants majeurs d'une cabale
intellectualiste et spéculative, il est aussi un mystique qui
expérimente les diverses pratiques extatiques et prophétiques et en
particulier celles qu'avait prônées Abraham Aboulafia. Il inscrit dans
un petit ouvrage le résultat de ses “exils” volontaires dans la
campagne, où, avec son maître et ami Salomon Alkabetz, il pratique la
libre association d'idées dans le but de recevoir des messages et des
enseignements du monde céleste (Sefer Guirouchin), essentiellement des
exégèses spontanées et inspirées de versets de l'Ecriture. La doctrine
de Cordovéro joua aussi un très grand rôle dans le développement du
Hassidisme.
Aucune édition critique de ses oeuvres n'a encore vu le jour, mise à
part des extraits conséquents de certains chapitres publiés par Bracha
Sack.
C. M
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