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PETITE ENCYCLOPEDIE DE CHARLES MOPSIK



 


ZOHAR (Livre de la Splendeur). Oeuvre théosophique écrite en araméen dans la Castille de la fin du XIIIe siècle. Pseudépigraphe attribué à rabbi Siméon ben Yohaï (fin du Ie et début du IIe siècle), il paraît avoir été rédigé par Moïse ben Chem Tov de Léon ou un par un autre membre de l'Ecole théosophique castillane à laquelle il appartenait. Cet ouvrage assez volumineux (environ deux mille pages), reflète les conceptions des cabalistes espagnols du XIIIe siècle appartenant au courant théosophique et théurgique, par opposition aux cabalistes prophétiques et extatiques dont Abraham Aboulafia fut le chef de file (suivant la classification mise en vogue par Moshé Idel). L'autorité et le prestige de ce livre qui se présente comme un commentaire (midrach) sur le Pentateuque et sur les cinq Rouleaux (en fait seulement du Cantique des Cantiques, de Ruth, des Lamentations) furent si grands qu'il devint la Bible de la cabale. Regardé comme un Livre saint du judaïsme, il passionna de nombreux érudits chrétiens de la Renaissance qui crurent y découvrir l'enseignement adamique primordial qui inspira la philosophie de Platon et les religions monothéistes. Oeuvre littéraire composite, puisqu'il comprend, outre le commentaire biblique, une série de traités (Livre du mystère, Grande et Petite Assemblée, Midrach ésotérique, Secrets des Lettres, Secret des secrets sur la physiognomonie, etc.), il est écrit dans un style assez inégal, mais qui est souvent celui de l'emphase mystique, de la poésie religieuse la plus élevée, de l'exaltation devant les mystères de l'univers. Son contenu doctrinal et philosophique est une sorte de néoplatonisme adapté à la tradition rabbinique, transformé, parfois renversé, pour qu'il serve à la description des dix sefirot, les degrés de manifestation de la divinité, qui sont perçues comme des réalités vivantes et parfois dotées d'une certaine personnalité. Les événements relatés par l'histoire biblique sont interprétés comme les symboles d'événements ayant lieu dans le monde divin, et les personnages de l'histoire sainte deviennent des figures quasi mythiques. Cette théosophie complexe et riche, dans laquelle domine la peinture de structures intradivines bipolaires masculines et féminines et de leurs relations, est liée à une conception de la pratique religieuse qui lui prête un pouvoir théurgique immense. Ainsi, le juste, figure idéale de l'homme pieux et fidèle, est capable par son action ici-bas et ses prières, d'unifier les composantes du monde divin (les sefirot), d'éveiller les puissances divines et de les renforcer, de changer le cours des choses, aussi bien en Dieu même que dans les régions inférieures du cosmos. Mais le Dieu qui se révèle dans ses sefirot n'est que l'émanation d'un principe caché et indicible appelé Eyn Sof (Infini), qui demeure hors de portée des croyances et des pensées, et dont la surabondance nourrit d'être tous les univers qui n'existent que parce qu'il épanche en eux ses influx vivifiants.
Aucune édition critique à ce jour, hormis un court chapitre sur le mystère des lettres publié par Stephen G. Wald : The Doctrine of the Divine Name, An Introduction to Classical Kabbalistic Theology, Brown Judaic Studies, 149, Atlanta, 1988.
 C. M.



 
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